Qu’appelle-t-on sujet? Politique des vies précaires et hospitalité
Conférence offert en format hybride à la Salle R-3680 du Pavillon des sciences de la gestion de l'UQAM et sur Zoom.
Veuillez vous inscrire (sans frais) en remplissant le formulaire au bas de cette page : https://cridaq.uqam.ca/activite/midi-cridaq-glb/
Résumé : Si toute une philosophie se plait à penser le sujet comme un être libre et souverain, ayant la force de commencer par lui-même des actions, je voudrais souligner en quoi être sujet c’est toujours être pris dans une structure antérieure d’interpellation et d’accusation qui transforme la vie en procès. Au commencement de son roman, Le procès, écrit par Franz Kafka, Joseph K à son réveil est arrêté et soumis à comparaître à son procès. Cette structure accusatoire, invisible mais toujours présente, implique que le sujet doit rendre des comptes à propos de lui-même, que ses témoignages sont pris dans une structure accusatoire et inquisitoire. Et si c’était là le lot de tous les sujets, essentiellement les plus précaires que de devoir rendre compte d’eux-mêmes face à un pouvoir ? Les processus de narration de soi s’avèrent ici essentiels. Le chômeur, acculé à la nécessité du travail, ne doit-il pas justifier en permanence qu’il est à la recherche d’un travail en adressant aux institutions sociales le récit de sa recherche ? Le migrant ne doit-il pas montrer qu’il est un persécuté pour bénéficier d’un titre juridique ? La fonction du témoignage est alors non de faire véridicité mais de lier le sujet à une structure d’interpellation qui est toujours potentiellement une structure d’accusation et à laquelle il doit se rapporter en permanence pour confirmer son être de sujet dont il peut être séparé précisément par l’interpellation qui lui demande des comptes. Il nous faudra nous demander dans cette perspective en quel sens et dans quelle mesure l’hospitalité peut être une contre-interpellation et surgir comme un contre-pouvoir. Une relecture de Derrida sera tentée à cet endroit.
Conférencier : Guillaume Le Blanc est philosophe, professeur de philosophie sociale et politique à l’Université Paris Cité. Il est membre de l’Institut Universitaire de France, du comité de rédaction de la revue Esprit. Il a publié une vingtaine de livres traduits en plusieurs langues dont Vies ordinaires, vies précaires (Seuil, 2007), L’invisibilité sociale (PUF, 2009), Dedans dehors. La condition d’étranger (Seuil, 2010), Que faire de notre vulnérabilité? (Bayard, 2011), La philosophie comme contre-culture (PUF, 2014), Vaincre nos peurs et tendre la main. Mobilisons-nous pour les exclus! (Flammarion, 2018) et dernièrement La solidarité des éprouvés. Pour une histoire politique de la pauvreté (Payot, 2022) et récemment Oser pleurer (Albin Michel, 2024) et Les passions dangereuses (Albin Michel, 2025). Il a consacré plusieurs ouvrages à Georges Canguilhem, à Michel Foucault, coordonné un dossier de la revue Esprit sur Michel de Certeau en 2022, « L’amour des marges. Autour de Michel de Certeau » ainsi qu’un dossier sur Merleau-Ponty, « Merleau-Ponty et l’âge de l’anthropocène » (2025). Il travaille sur les questions de la norme, de l’exclusion et des formes de résistance des plus précaires. Il a par ailleurs publié plusieurs études sur la littérature américaine contemporaine (Cormac McCarthy, Richard Ford, Russell Banks, etc.) dans la revue Esprit.
La conférence sera commentée par Bernard Gagnon (Philosophie, UQAR).

Date / heure
Lieu
Montréal0