Comment les musées sont tombés amoureux des cartes: art et cartographie, un lien sensible, complice et effervescent
La cartographie est un champ disciplinaire qui emprunte à une multitude de domaines qui se croisent et éventuellement se complètent : géographie, économie, géopolitique, mais aussi philosophie, sociologie ou encore anthropologie. Par ailleurs, la cartographie est depuis longtemps tiraillée entre le monde de l’art et celui de la science… Elle puise indistinctement dans l’un et dans l’autre : une carte mobilise des données qu’il faut traiter de manière scientifique, mais elle sollicite les moyens de l’art, la « science » des formes, des couleurs et des mouvements. Le matériau, la matière première qui sert à fabriquer la carte, doit être abordé avec la rigueur de la science et une sensibilité artistique et esthétique. Les cartes produisent ainsi une vision du monde, non pas tel qu’il est dans un réel supposé, mais tel que nous le comprenons et l’interprétons, ou même, en considérant notre imaginaire, tel que nous aimerions qu’il soit.
Philippe Rekacewicz, né en novembre 1960 à Paris, est géographe, cartographe et information designer. Il achève ses études de géographie à l’université de Paris I (Panthéon-Sorbonne) et devient — de 1988 à 2014 — un collaborateur permanent du Monde diplomatique. Il a parallèlement dirigé, de 1996 à 2008, une unité cartographique — délocalisée en Norvège — du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), le GRID-Arendal.
Il travaille actuellement sur plusieurs projets sociogéographiques (utilisation concurrentielle et production de l’espace public/privé, perception et représentation des frontières) et s’intéresse aux relations qui unissent la cartographie avec l’art, la science et la politique (apports de l’art dans la production). Il conduit en outre une recherche sur la sémiologie graphique et « les écritures cartographiques en prolongement », c’est-à-dire l’émergence de la cartographie radicale (ou critique, ou encore expérimentale et sensible). Il participe à de nombreux projets carto-artistiques et « d’art politique ». Depuis 2021, il est chercheur associé rattaché au département des sciences sociales de l’université de Wageningen aux Pays-Bas.
